• les geants

    Les géants sont des personnifications mythiques de la force brutale. On les trouve mêlés à toutes les inventions par lesquelles l'imagination cherche à se rendre compte du jeu des éléments dans le monde, de leur lutte accidentelle contre la loi d'ordre et d'harmonie, et aussi des civilisations barbares qui ont préludé par des chocs violents à l'organisation des sociétés policées. La Bible fait mention d'un peuple de géants. Ils habitaient la terre promise avant l'arrivée de Moïse : Og, roi de Basan, l'un d'eux, n'avait pas moins de neuf coudées. On connaît également l'épisode de David contre Goliath, un géant, que l'on voudra faire d'autant plus grand que la victoire - fondatrice de sa puissance politique - de David doit être éclatante. On rencontre encore des géants dans les mythes nordiques. Mais c'est sans doute la mythologie grecque, qui plus que toute autre a eu le sentiment de la faiblesse humaine, en même temps que le souci de la démarcation entre le barbare et le civilisé, qui a fait à ses personnages la place considérable.  
     
       A vrai dire les Géants ne sont, qu'une classe parmi les êtres monstrueux qui ont précédé les humains sur la Terre et qui y ont tout d'abord contrecarré leur empire ou celui des dieux. Pour Homère, les Géants sont associés aux Cyclopes et aux Phéaciens, ceux-ci assez semblables aux bons Géants de la Mythologie scandinave et germanique; tous ensemble peuvent revendiquer encore, comme étant de leur espèce, les Titans que l'on rencontre dans l'Iliade, tandis que les Géants apparaissent pour la première fois dans l'Odyssée. Le chef des Géants, Eurymédon, périt, lui et son peuple, mais sa fille mit au monde Nausithoos, fils de Poséidon et roi des Phéaciens, au temps où ceux-ci habitaient dans le voisinage des Cyclopes. L'Odyssée, roman d'aventures maritimes, semble avoir conçu surtout les Géants comme les forces violentes et destructives de la mer. Chez Hésiode, ils sont des fils de Gaïa (la Terre), au même titre que les Érinyes et les Nymphes Méliennes; c.-à-d. qu'ils sont issus du sang d'Ouranos mutilé par son fils Cronos. A partir de ce moment s'associent de préférence dans la légende aux désordres volcaniques, aux grands ébranlements et aux éruptions violentes qui ont entassé les rocs aux proportions terribles et élevé jusqu'aux nues les sommets vomissant des flammes. Les procédés anthropomorphiques des poètes en font des figures humaines, de haute stature, de force colossale, resplendissant sous les armures et tenant dans leurs mains des lances formidables.  
     
    L'épisode capital de la légende des Géants est leur lutte contre les dieux; la Gigantomachie est une matière épique qui, après avoir défrayé les traditions des peuples, est sans cesse exploitée par la poésie, puis par l'art grec sous toutes ses formes. C'est à l'instigation de Gaïa que le combat s'engage contre les habitants de l'Olympe; Pindare est le premier, par ordre de date, d'entre les poètes connus, qui ait fait de cet épisode un drame animé, lui donnant pour conclusion la glorification de la lignée des dieux, à laquelle Zeus préside. Le théâtre de la lutte varie suivant les traditions locales; Pindare le place dans la plaine de Phlegra en Thrace; d'autres sur la côte Nord-Ouest de la mer Égée, d'autres, plus tard chez les Latins, dans les régions tourmentées de Cumes en Campanie; il n'y a pas de hauts sommets, soit sur le continent hellénique soit dans les îles, qui ne rentrent, chez quelque poète, dans la sphère d'action des Géants révoltés contre l'Olympe; et le plus souvent l'art se fait sur ce point l'écho de la légende populaire. Pour déloger les dieux de leur empire, les Géants entassent des montagnes, les lancent comme autant de projectiles contre le palais de l'Olympe, manient les grands arbres devenus des torches, vomissent la flamme et font entendre d'effrayantes clameurs.  
     
     
     
    Ce symbolisme est emprunté, semble-t-il, aux phénomènes volcaniques, aux souvenirs des éruptions et des tremblements de terre. Vaincus, c'est sous les rocs tourmentés, là surtout où persistent des manifestations du volcanisme, que les Géants sont confinés comme dans une prison, soit ensemble, soit isolément. L'histoire d'Encelade racontée par Pindare puis par Virgile, qui le relèguent dans les profondeurs de l'Etna, peut être considérée comme L'expression typique de cette partie du drame.  
     
    Tous les dieux prennent part au combat dont l'enjeu est le gouvernement du monde; ceux qui s'y distinguent le plus sont Zeus qui, fait agir la foudre et l'aigle, puis Athéna avec l'égide et Poseidon avec le trident. Une des particularités curieuses de la légende est celle qui fait dépendre la divinité d'Héraclès et même celle de Dionysos, considérés jusque-là comme des héros mortels, de leur intervention dans la lutte et de leur influence sur la victoire. L'être particulier de chaque divinité, ses rapports avec Zeus ou avec les Géants eux-mêmes, ont permis aux poètes de varier à l'infini les épisodes; c'est ainsi que pour les uns Aphrodite seule s'enfuit de l'Olympe avec Éros, au moment où la bataille s'engage, alors que pour d'autres l'arc d'Eros suffit à dompter les Géants et à leur faire tomber les armes de la main. Si l'on remarque que le nombre des Géants est porté lui-même jusqu'à vingt-quatre et que la poésie des Alexandrins, puis celle de leurs imitateurs latins, s'ingénie à mêler le monde divin tout entier au drame, on comprendra sans peine quelles ressources un pareil sujet pouvait offrir à la manie des descriptions mythologiques. Du côté des Géants, il faut signaler comme s'étant surtout distingués, Alcyoneus tué par Héraclès; Porphyrion, qui succombe sous les traits combinés de Zeus et d'Apollon, Ephialtos, Encelade, etc.  

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